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Où est le sens ?

Dernière mise à jour : 3 déc. 2022

Sébastien Bohler - 2020




Sébastien Bohler, journaliste et docteur en neurosciences, rédacteur en chef du magazine Cerveau & Psycho, pose la question dans son livre Où est le sens ? des choix à faire pour changer l’avenir de notre civilisation afin qu’elle évite l’auto destruction (Bohler, 2020).


L’auteur fait le constat que le monde est au bord de l’asphyxie : extinction des espèces, dérèglement climatique, pollutions. Il affirme que l’humanité ne peut plus maintenir une civilisation basée sur l’individualisme, la compétition, le profit et la consommation.


Sa conviction repose sur l’idée que le sens est plus important pour vivre que tout le reste, et son intuition est que le sens doit forcément avoir une valeur de survie pour l’humanité. Il a pour thèse que le cortex cingulaire a pour fonction de nous pousser sans relâche à chercher du sens à nos existences.


Cela a conduit l’humanité à construire dans ses débuts « un sens cosmique », puis « un sens religieux » avec le regroupement dans les villes. Puis, avec la période actuelle, la question du sens est évacuée : c’est la perte de sens qui entraîne toute une série de comportements. Il précise que quand vous posez la question de sens, vous ouvrez la boîte de Pandore, où l’humain est capable du meilleur comme du pire. Le meilleur sens serait de fonder une société basée sur la cohérence, la signification et le lien.


Bohler fait des ponts entre les neurosciences, la sociologie et l’histoire pour présenter la dialectique entre le stratium et le cortex cingulaire. Le stratium est une structure « archaïque » du cerveau, et des circuits de récompense, qui nous pousseraient à assouvir sans cesse et toujours plus nos besoins fondamentaux et le cortex cingulaire est « une structure à même d’intégrer des systèmes de signification plus larges pouvant aller jusqu’à la perception d’un sens dans l’existence et dans l’univers tout entier ». (Bohler, 2020).


Sur le plan des neurosciences, il décrit les facteurs qui alarment (incertitude, indétermination, peur de l’inconnu) ou qui apaisent (technologies, addictions, appartenance à un groupe, estime de soi) le cortex cingulaire. Lorsqu’il y a trop d’alarmes, cela provoque l’angoisse (passé), l’anxiété (futur), les crises dépressives, les implosions.


Le postulat de Bohler est que le monde dans lequel nous vivons a évacué les questions de sens, ce qui se traduit par des phénomènes de burn-out au travail, l’augmentation des thèses complotistes et l’anomie (disparition des valeurs communes à un groupe). Il décrit plusieurs boucles systémiques dysfonctionnelles et montre que les problèmes se logent dans les solutions pour apaiser le cortex cingulaire.


Plus de technologies (informatique, 5G/caméra), d’addictions (séries télé, nourriture, drogue), de culte de l’estime de soi (luxe, marques) entraînent une surproduction, une surconsommation d’électricité, ce qui entraîne une pression sur les ressources et des émissions de gaz à effet de serre, de la pollution, accélérant le réchauffement climatique et provoquant davantage d’incertitudes sur l’avenir. La boucle est bouclée. La boucle de surconsommation s’accélère avec l’hyper compétition, ce qui rend le monde encore plus indéchiffrable, absurde et incertain.


L’appartenance à un groupe n’est pas un mal en soi, sauf lorsqu’il pousse au repli identitaire et nationaliste qui va rechercher un bouc émissaire face à l’augmentation de l’incertitude, de l’indétermination et de la peur de l’inconnu.


Le cortex cingulaire participerait à la construction de notre représentation du monde, à avoir des relations de qualité avec autrui, à évaluer la cohérence entre nos actes et nos valeurs.


Bohler expose alors deux futurs possibles pour l’humanité : d’un côté, une dictature technologique (comme ce qui semble se profiler en Chine) et transhumaniste (comme ce qui semble se profiler dans la Silicon Valley) ; de l’autre, un retour à des valeurs communes, un consensus pour construire un « sens écologique ».


L’essai de Bohler associant une zone du cerveau à une ou plusieurs fonctions est critiqué par quelques scientifiques comme Naudé, chargé de recherche au CNRS (Naudé, 2019), et Procyk, directeur de recherche à l’Institut Cellule Souche et Cerveau (SBRI) (Procyk, 2017), qui montrent que le cortex cingulaire n’aurait pas simplement vocation à détecter des erreurs, il participerait également à construire un historique de prédiction avec le réel, ce qui permettrait d’évaluer s’il est pertinent ou non de changer de comportement, cela en résonance avec des régions impliquées dans la détection d’événements et dans le changement de stratégie (Gabert, 2021). Ce sont des microprédictions et des microcertitudes que le cortex cingulaire nous pousse à fabriquer pour réduire l’incertitude face à l’avenir.


Dans la perspective du coaching de dirigeants et du coaching d’équipes, la thèse de Sébastien Bohler nous invite à réfléchir aux questions d’addictions, de sens, de développement durable, de responsabilité sociétale des entreprises, et d’entreprises à missions.



Sens cosmique --> Sens religieux --> Période libérale : perte de sens

--> Consensus humanitaire ou Dictature technologique ? --> Sens écologique


Pour aller plus loin



Pour le débat contradictoire


Je recommande cette excellente vidéo Suis-je mon cerveau ? | Albert Moukheiber, docteur en neurosciences | Les idées larges | ARTE

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